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Black Friday : allons jusqu’à l’interdiction de Shein et Temu !

Dans le respect du principe de précaution.

Ce vendredi 29 novembre marque le début du célèbre Black Friday, avec son lot de promotions spectaculaires. Smartphones, électroménager et prêt-à-porter en sont les stars. Chaque année, l’opération est un succès car il s’inscrit dans les nouvelles habitudes de consommations : 71% des européens passent régulièrement des commandes en ligne plutôt que de passer par des commerces locaux.

Derrière ce changement profond de comportements et le « Vendredi noir », les commerçants européens s’éteignent à petit feu, au profit des commerçants étrangers et particulièrement des grandes plateformes chinoises, comme Shein et Temu.

Une “invasion” des plateformes venues de Shein

Les grandes plateformes chinoises de ventes à prix cassés dominent désormais le marché : Temu, Shein ou Aliexpress connaissent des croissances phénoménales, axées sur des modèles de ventes à perte, et un chapelet de manœuvres frauduleuses. Leurs colis envahissent les marchés européens et saturent les services postaux : 22% des activités de La Poste dépendent de ces plateformes.

D’où vient ce succès commercial ? Dans un contexte de forte pression sur le pouvoir d’achat, l’offre est irrésistible. Sur Temu, une montre connectée peut coûter 20 €, contre 250 € sur d’autres plateformes, comme la FNAC. Sur Shein, on peut acheter un sweat à capuche pour moins de 10 €, contre 30 pour des marques de prêt-à-porter abordables, comme Zara.


A un mois de Noël, une montre connectée peut coûter 20€ sur Temu contre une moyenne de 250€ sur d’autres plateformes comme la FNAC.

 

Une catastrophe, économique, sociale et climatique

Que cachent ces prouesses commerciales ? La surproduction chinoise écoulée par ces plateformes a un impact économique, social et environnemental dramatique.

D’après une enquête menée par Forbes, le fret aérien employé par Temu et Shein mobilise l’équivalent de 88 Boeing 777 qui circulent chaque jour entre la Chine et l’Europe ou les États-Unis pour transporter 9.000 tonnes de marchandises. Un bilan 44 fois plus polluant que le transport par voie maritime, préféré dans un souci d’optimiser les temps de livraison. C’est une catastrophe pour le carbone !

Ne conduisant aucun audit sur les fournisseurs, Temu et Shein, n’ont aucune politique interdisant la fabrication des produits où sont exploités la minorité des Ouïghours dans des conditions relevant du génocide et de l’esclavage.

Enfin, les fabricants français et européens souffrent d’une compétition inégale. En France, le respect de standards sociaux, fiscaux et sanitaires exigeants ne permet pas aux producteurs tricolores d’aligner des prix suffisamment compétitifs. Or, notre pouvoir d’achat s’effondre depuis dix ans, et le prix reste donc le premier critère d’achat d’un produit pour 80 % des consommateurs.

Rendre obsolète le business model des plateformes chinoises par la régulation

Nous devons protéger activement notre économie et nos consommateurs, promouvoir le Made in France, et faire émerger une politique du Made in Europe. Cela passera par la régulation des plateformes de e-commerce chinoises. Face au désastre que représentent Shein et Temu, l’Europe ne peut se contenter de demi-mesures, car leurs pratiques offensives auront des graves retentissements économiques, sociaux et environnementaux.

Trois pistes de réformes sont sur la table, afin de rendre obsolète leur business model.

Premièrement, nous devons opérer une réforme du Code des douanes de l’Union européenne. En octobre 2024, le Parlement européen, tout comme le nouveau commissaire au Commerce et à la Sécurité économique, se sont engagés à supprimer l’exemption de droits de douane aux colis de moins de 150 euros. Cette révision est en cours et devra aboutir urgemment, afin d’annuler l’avantage comparatif des commandes de Shein et Temu. A terme, la réforme devra s’accompagner d’un renforcement des contrôles de douanes dans les aéroports.

Deuxièmement, nous devons nous doter d’une politique de tolérance zéro envers l’importation de produits non conformes aux réglementations européennes. Il en va de la santé des européens.

Le groupement Toys Europe, en février 2024, a analysé 19 jouets achetés sur Temu. 
Résultat : 18 des 19 jouets ne répondaient pas aux normes CE qui garantissent la sécurité des consommateurs. Et notamment celles relatives aux risques de coupures, aux étouffements ou à aux strangulations, ou aux risques chimiques. 
Les autorités sanitaires Sud-Coréennes ont de leur côté mesuré au printemps 2024 que des vêtements pour enfants vendus par Shein, Temu et AliExpress pouvaient contenir 100 à 420 fois la limite légale de substances toxiques.

Les plateformes chinoises ne respectent à ce jour pas les règles de traçabilité de l’UE. Si Shein et Temu continuent de contrevenir au droit, il faudra aller jusqu’à empêcher l’accès à ces plateformes, en application du principe de précaution. Et cela tant qu’elles ne respecteront pas les normes de sécurité pour le consommateur, ainsi que les conditions sociales et environnementales.

18 jouets sur 19 achetés sur TEMU ne respectent pas les normes CE de sécurité des consommateurs et posent des risques sanitaires. Les vêtements pour enfant vendus sur SHEIN peuvent contenir 100 à 240 fois la limite légale de substances toxiques.


Troisièmement, nous devons agir face au caractère malveillant de leurs méthodes de marketing, qui poussent les jeunes consommateurs à l’addiction numérique. Leurs pratiques sont agressives et néfastes : le recours massif aux micro-influenceurs, rémunérés pour promouvoir des produits nocifs pour notre santé, est un des problèmes majeurs auxquels nous devons nous attaquer. La « gamification », une conception addictive proposant des programmes de récompenses similaires à des jeux, permet aux jeunes de gagner des “cadeaux” ou des “réductions”. Ces pratiques ont une influence négative sur la santé mentale des consommateurs.

Face à ces pratiques agressives, une grande loi doit voir le jour. 
Le futur Digital Fairness Act, piloté par le nouveau commissaire à la justice Michael McGrath, devra à ce titre combler les failles de la Loi européenne sur les services numériques (DSA) et protéger les consommateurs européens d’un écosystème numérique doté de nouveaux outils et disposé à s’en servir pour tromper et abuser les citoyens.